S'il y a bien un domaine
qui en toutes saisons ne connaît pas la crise, c'est celui de la
publicité. D'ailleurs, quoi de mieux pour illustrer le domaine
publicitaire que la formule d'un ancien PDG de TF1, nommé Le Lay.
Cet individu s'était distingué il y a quelques années avec une
phrase à la fois cynique et triviale : "Pour qu'un message
soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit
disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible
: c'est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer
entre deux messages."
La pub est vraiment
partout, dans la rue, à la télévision ou au cinéma. J'ai justement
repensé à cette formule du "temps de cerveau disponible"
il y a quelques jours en me rendant au cinéma. Une séance annoncée
pour 15 heures, avec un début effectif à 15 heures 15. Et dans
l'intervalle alors ? Et bien que de la publicité, seule chose à
contempler dans l'attente de cette salle obscure.
La publicité s'impose
plus ou moins directement sur les gens et leurs esprits. On baigne
dans une véritable atmosphère d'hypocrisie.
Je pensais seulement
évoquer l'aspect publicitaire dans ce papier... Mais le fameux film
de 15 heures 15 de dimanche dernier en a décidé autrement. C'était
"Django", le dernier film de Tarantino. J'aime bien
certains films de Tarantino, bien que l'on ressente à chaque fois un
esprit déjanté voire des sauces à l'hémoglobine trop prononcées.
J'ai beaucoup aimé "Pulp Fiction" ou encore "Reservoir
Dogs".
Et là, c'était donc
"Django". La fiction se déroule peu avant la Guerre de
Sécession et évoque la traite des Noirs. Les décors sont superbes,
et pour tout dire, la première partie commence plutôt bien. Ce film
n'est d'ailleurs pas à ranger dans la catégorie des médiocres,
loin de là. Mais peu à peu, l'artifice et le longiligne remplacent
l'inattendu. Tout le long, nombreuses sont les giclées de sang, si
bien qu'il y en aurait presque un aspect malsain, pervers voire
éjaculatoire.
Et puis au bout 2 heures
45, le film s'achève. Avant que ne défile la longue liste de ceux
qui ont participé de près ou de loin au film, un message de la
production en langue anglaise s'affiche à l'écran : "Aucun
cheval n'a été maltraité ou tué durant le tournage". Et
c'est là qu'il y a matière à se poser plusieurs réflexions, même
sur un détail qui pourrait paraître aussi minime :
- Le réalisateur a voulu
montrer dans ce film toute la violence qui pouvait exister à ce
moment du XIXème siècle aux États-Unis, le sang humain ayant été
versé à flots en toute indignité. La mort d'animaux (en
l'occurrence des chevaux) est également montrée dans le film. Il y
aurait donc dans cette fiction un certain panorama d'une ancienne
réalité.
Mais...
- Les spectateurs
sont-ils pris pour des cons ? En croyant qu'ils pourraient penser que
des chevaux ont été maltraités ou tués dans le cadre d'un film à
dimension internationale avec des dizaines et des dizaines de
millions d'euros en jeu.
- Le réalisateur
s'est-il senti une telle obligation de rassurer le lobby animaliste ?
- Le sang animal
serait-il donc plus choquant pour certains que le sang humain ?
En plus de laisser
perplexe en fonction des goûts de chacun, ce film "Django"
laisse ce message final et douteux. Un petit message anecdotique pour
des sociétés où une grande hypocrisie règne, car beaucoup ne sont
absolument pas choqués par le sang humain, réel ou virtuel, mais
s'offusquent dès qu'il est question de sang animal. La corrida n'a
bien évidemment rien à voir dans tout cela, et je n'établirai pas
le parallèle. Le temps disponible des cervelles animalistes devait
en tous cas être aux anges, et rassuré.
J'en viens enfin, et cela
n'a rien à voir avec ce qui précède, au mécanisme de la
publicité. Il est présent partout, et nous envahit de plus en plus,
si bien qu'il fait partie intégrante du décor. Comme s'il était
indispensable.
En tauromachie aussi, la
publicité avance de jours en jours. Je prendrai comme exemple
éloquent celui des "gestes des figuras", qui depuis le
début de l'hiver, multiplient les effets d'annonce. Désormais, on a
l'impression que le simple fait de s'annoncer avec un élevage moins
ordinaire que d'habitude est comme un "avant triomphe". De
même, certaines cérémonies d'annonces de ferias et de cartels vont
dans ce sens. Un sens qui voudrait que l'on puisse triompher
plusieurs mois avant les corridas en question ! Exemple : "annonce
de cartels d'une arène Y, 800 personnes pour y assister, oh là là
quel triomphe !". Et pourtant, la réalité de la corrida ne se
joue que dans l'arène. Le reste n'est que communication et
atmosphère publicitaire. On aura beau annoncer des vedettes dans 50
arènes avec 50 élevages différents, on ne peut pas vraiment s'en
faire les gorges chaudes, car d'une corrida à une autre, le
caractère imprévisible des toros ou des éléments peut changer la
donne.
En matière de publicité,
les petites arènes (celles qui sont petites par la taille et n'ont
pas vocation à se prétendre grandes) semblent adopter la politique
la plus humble et la plus vraie, puisqu'elles annoncent les Toros
d'abord, et mettent moins en avant l'aspect artificiel.
Florent