Lundi matin, j'ai dû
passer de longues minutes à observer ce splendide toro de Dolores
Aguirre. Au moins cinq minutes, peut-être dix, voire même quinze.
Ce toro, aux cornes affûtées comme des poignards, c'était "Comadroso", le numéro 25.
Seul devant
son enclos, je me suis dit une fois de plus à quel point notre
passion était belle, à admirer ces toros vivre, combattre puis
mourir. Pourtant, on nous accuse de tous les maux, on aimerait nous
condamner, nous interner et nous faire disparaître. Il paraît que
notre passion est cruelle, immonde et inhumaine.
Dans une
époque où l'on a tendance à chérir les choses superficielles, la
corrida est un intrus. Pour nous, passionnés, elle est quelque chose
de trop vrai..
Mais sans
cesse, des personnes qui s'auto-proclament "voix autorisées"
la condamnent sans pour autant la connaître. Dans leur bêtise
incommensurable, elles viennent même la placer au sommet de
l'horreur dans une société. Il faut vraiment être aveugle pour
énoncer un tel postulat.
Rien
d'étonnant pourtant quand on voit la société dans laquelle on vit,
où il existe une permanente surenchère de personnalité, où l'on
tente absolument de hiérarchiser tous les êtres humains les uns
entre les autres. Sordide culture de la comparaison, raisonnements
intellectuels malsains. Et inculte courroux que celui qui voudrait
nous envoyer dans une tombe et dans l'oubli.
A regarder ce
magnifique "Comadroso", je me suis dit (une bonne fois de
plus) que connaître ce domaine aussi unique sur Terre était une
chance. "Comadroso", lui, est beau, magnifique. J'imagine à
peine la trouille qu'il pourra semer dans quelques heures dans les
arènes tellement sa charpente est impressionnante.
Dans les
arènes, les toros meurent et on les admire. "Comadroso"
est mort, lundi, un peu après 19 heures. Il est mort, et comme
prévu, il a fait peur à tous les occupants de la piste de
Vic-Fezensac, et à bien du monde qui était venu garnir les gradins.
Un toro
puissant, sauvage, indomptable, et qui jamais ne s'est laissé
approcher. Un adversaire difficile et d'un danger à vous en donner
des frissons.
"Comadroso"
est mort vers le centre de la piste, et on l'a ovationné. Il n'était
pas un toro brave, mais un toro de respect, à remplir la mémoire
d'émotion.
La parole est
d'argent, le silence est d'or, et les toros de combats sont beaux
même dans leurs derniers souffles. Pris de passion pour eux, jamais
on ne les oublie.
Florent