Cinquante minutes, c'est
en règle générale la durée des matchs de tennis expéditifs, lors
de tournois mineurs. Des matchs gagnants en deux sets, que l'on
entrevoit parfois à la télévision, avec des vides impressionnants
sur les gradins entourant le court. Des matchs de peu d'enjeu, et
dont l'issue est presque courue d'avance.
Cinquante minutes, ce fut
également la durée de la fiesta campera matinale à Garlin ce
dimanche. Mais là, il n'y avait absolument rien à voir avec un
match de tennis de série B.
Le soleil ne s'était pas
encore réellement levé. A 11 heures 05, ou à 10 heures 05 si l'on
était resté à l'horloge d'hiver, "Potrillo", n°18, de
Pedraza de Yeltes, a déboulé sur la petite piste garlinoise.
Il était le premier des
huit pensionnaires de cet élevage combattus en ce 13 avril. Sept des
huit Pedrazas arboraient par ailleurs un pelage colorado.
Haut et corpulent,
"Potrillo" imposa le respect dès son entrée sur le sable.
Et son combat fut un véritable régal pour l'aficionado. Très
brave, il poussa fixement dans le caparaçon de Gabin Réhabi, qui
réalisa un bon tiers de piques, malheureusement le seul de qualité
de la journée.
Trois piques, et un
comportement à la fois brave, mobile et exigeant. De quoi faire un
parallèle avec les toros de Joselito entre les temporadas 2008 et
2011. Deux élevages du même encaste Domecq, pour lesquels on peut
trouver des similitudes au niveau du comportement. Le fruit d'une
sélection exigeante à chaque fois. Mais les toros de Joselito ont
tout de même bien baissé en niveau et en caste ces dernières
saisons.
"Potrillo" fut
combattu par le novillero colombien Guillermo Valencia. Ce dernier ne
se démonta pas et fit face, malgré sa petite taille et son statut
de débutant.
Alors que le ciel était
nuageux, presque brumeux, on assista ravis à ce beau combat. Une
fois à terre, le public demanda le tour de piste pour "Potrillo".
Il n'y avait pas d'habits de lumières, ni même de présidence. Et
malgré cela, le brave novillo de Pedraza de Yeltes (qui possédait
des armures intactes bien qu'il s'agisse d'une fiesta campera) eut ce
tour d'honneur fort mérité.
En ce type d'occasions,
il est réjouissant de voir que l'afición réponde présente et
récompense ces bêtes authentiques. Et il était important de ne pas
passer à côté d'un tel novillo.
Après voir vu cela, il
était fort difficile d'aller "a más" concernant le
bétail.
L'autre novillero
matinal, c'était Alejandro Marcos de Salamanque, qui possède une
semaine d'ancienneté dans l'échelon des novilladas piquées.
Courageux et prometteur, il fut mis en difficultés et accroché
plusieurs fois par un adversaire exigeant, mais pas aussi encasté
que le précédent.
Le public souverain
décida ainsi de qualifier Guillermo Valencia pour la novillada de
l'après-midi.
Sous un grand soleil, la
novillada vespérale n'atteignit jamais le niveau de "Potrillo"
combattu quelques heures plutôt. La chose vraiment intéressante
chez les novillos de Pedraza, ce fut leur solidité. Comme en
témoigne le premier, "Pomposito", littéralement assassiné
en deux piques interminables, mais qui garda de la mobilité et du
tempérament malgré le fort châtiment.
C'est José Garrido,
d'Extrémadure, qui fut chargé de le combattre. Garrido, c'est
probablement le novillero le plus en vogue à l'heure actuelle. A de
nombreuses reprises, ce jeune homme a démontré son talent dans les
arènes, du fait d'une tauromachie posée et ornée de beaucoup de
qualités.
Une arme à double
tranchant, puisque Garrido est attendu au coin du bois à chaque
course. Dans l'attente d'un succès constant. Or à Garlin, ce fut
plutôt l'inverse, car Garrido a déçu, malgré ses beaux gestes.
Comme une tendance à trop en faire... Face au noble premier, il
donna une pâle copie de ses belles prestations habituelles, et au
quatrième, faible et à la charge décomposée, il n'y avait rien à
retenir.
Filiberto Martínez lui
aussi est un novillero d'avenir. Il détient une tauromachie bien
huilée, propre et sans scories. Trop propre même en certaines
occasions, le jeune Castillan ayant tendance à toréer "fuera
de cacho". Son premier opposant fut d'une grande noblesse,
tandis que le cinquième, sérieux de présentation, était plus
compliqué.
Ce cinquième, baptisé
"Resiste mucho", se livra au cours du combat, et offrit à
plusieurs moments une franche noblesse. A l'heure de vérité,
Filiberto s'engagea et fut soulevé de façon spectaculaire. Deux
oreilles furent accordées au novillero, et elles n'étaient pas
totalement étrangères à l'accrochage final.
Le qualifié du matin,
Guillermo Valencia, s'était entre temps vêtu de l'habit de
lumières. Un costume obscur, noir brodé de noir ! La bataille face
à "Potrillo" avait été rude, et il restait au colombien
deux novillos à occire.
Face à eux, Valencia fut
avant tout courageux, très volontaire, et ne put cacher son manque
de métier. Avec ce matériel noble et encasté (surtout le sixième),
il ne baissa jamais pavillon.
De cet après-midi, on
retiendra donc la solidité du bétail de Pedraza de Yeltes, avec des
comportements assez variés. Le point majeur restant tout de même le
combat matinal de "Potrillo".
Dans la piste étroite de
Garlin, remarquons que les lidias ne sont jamais évidentes. On y
pique les novillos dans un coin de l'arène. Est-ce vraiment
l'endroit propice ? Faute de mieux ? Il faudra y réfléchir à
l'avenir.
Il n'empêche que malgré
ses origines communes, l'élevage de Pedraza de Yeltes confirme sa
bonne période, et maintient l'intérêt pour les aficionados.
Autre bonne nouvelle, on
ne vit en ce jour de printemps aucun bajonazo.
Avec une bonne évolution
et davantage de métier, on pourrait compter sur José Garrido,
Filiberto Martínez, Guillermo Valencia et Alejandro Marcos. Quatre
garçons pleins d'avenir.
Florent