Noël au balcon, Pâques
à Mugron, où la météo était incertaine et le vent soufflait en
rafales durant toute la matinée. Aller aux arènes, c'est aussi
faire abstraction d'un certain nombre de choses avant d'écrire quoi
que ce soit. Car la piste d'une arène, vue des gradins, est un
endroit sans paroles, où l'on peut seulement apprécier des
mouvements, hormis les cris des cuadrillas qui parfois exhortent des
toreros ou novilleros avec des "biennn"
sans fin, alors que non ce n'est pas bien, et que cela ne rend guère
service au torero.
Tenter de faire
abstraction des paroles prononcées par un torero ou un éleveur
avant une corrida, éviter de juger en termes de sympathie ou
d'aspect humain. Tout cela pour éviter d'avoir un a priori, qu'il
soit positif ou négatif.
Samedi 26 mars, l'éleveur
portugais Murteira Grave était l'invité de la peña A los Toros de
Mont-de-Marsan dans le cadre d'une conférence. Un débat d'une belle
tenue, très accessible, avec beaucoup d'interrogations, et aussi des
éléments qui n'ont rien donné d'étonnant à la sortie des
Murteira Grave deux jours plus tard. Il serait trop long de retracer
en intégralité les paroles de Murteira Grave ce soir-là. Mais son
envie assumée d'être le "Fuente Ymbro
portugais" avait de quoi interpeller. Si pour un élevage
récent, prendre exemple sur Fuente Ymbro n'aurait rien d'étonnant,
il en est tout autrement pour Murteira. De par son antériorité
comparé à Fuente Ymbro, son histoire et sa réputation, il est
curieux que le représentant de Murteira Grave choisisse un exemple,
quel qu'il soit.
Car
l'affiche de Mugron ce lundi de Pâques avait de la gueule. Murteira
Grave, un nom et une histoire, confrontés à trois novilleros :
Joaquín Galdós (novillero puntero qui a fait ses preuves en 2015),
Pablo Aguado (très attendu dans un registre artiste), et Luis David
Adame (dirigé par l'empresa de Las Ventas, et où il sera deux fois
au paseo pendant la San Isidro).
L'an dernier, la
novillada de Baltasar Ibán de Mugron était superbement sortie, et
avait livré une course passionnante, alors que l'on n'en attendait
peut-être pas autant. Cette année, ce fut peut-être l'inverse,
avec probablement trop d'attente autour du nom de Murteira Grave.
Mais on ne peut pas résumer l'actualité de cet élevage à la seule
novillada combattue à Mugron, même si elle semble s'inscrire dans
le tournant désiré par le ganadero.
Deux tiers d'arène, un
ciel clément, et des Murteira Grave qui globalement ont été fades
et ont manqué de fond. La faiblesse du premier novillo a fait
débuter la course sur une mauvaise note. A la pique, certaines
charges vives et puissantes à la première rencontre avaient de quoi
donner espoir. Aussi, quasiment tous les novillos ont été très mal
piqués, à l'exception du quatrième, face auquel Luis Miguel Leiro
fit un peu mieux que les autres picadors. Mais pour l'ensemble,
Murteira Grave, ce nom qui chante, a fait déchanter.
Le péruvien Joaquín
Galdós a semblé plafonner, sans donner d'émotion, et en tirant
trop de passes. Le concept de l'andalou Pablo Aguado est intéressant
et ne laisse pas indifférent, un novillero que l'on peut détester
et admirer à la fois. Au deuxième, encasté et brusque, Aguado a
été dépassé et a montré des limites techniques. Mais face au
cinquième, "Aguila", de très bon fond
mais manquant malheureusement de forces, l'allure de Pablo Aguado, sa
personnalité et les jolis muletazos ont pris le dessus. Un échec
avec l'épée a limité le succès à un tour de piste.
Enfin le mexicain Luis
David Adame, frère de Joselito, paraît moins sobre que ce dernier,
et moins virtuose que lui lorsqu'il était novillero. A Mugron, s'il
a démontré un courage certain, Luis David Adame a été en de
nombreuses occasions pueblerino voire vulgaire. Se sont détachées
chez lui des poses de banderilles très exposées et une estocade
valeureuse face au sixième.
Enfin, que l'on se
rassure, assis au balcon présidentiel, messieurs Lucasson, Duloste
et Lacoume n'ont flingué personne.
Florent