J'ai adoré Calasparra. Tout d'abord la
route pour s'y rendre, d'une feria à une autre, de Villaseca de la
Sagra à Calasparra. Cette route qui vous fait traverser en diagonale
La Mancha, et où l'on peut commencer par une halte à Consuegra, au
pied de ses célèbres moulins. Vent léger et frais d'un matin de
septembre, horizon désert, pas un touriste : quel pied.

Mais depuis Consuegra, il reste encore
300 bons kilomètres avant d'arriver dans la région de Murcie.
Alcázar de San Juan, Tomelloso, Villarrobledo, Albacete, puis
Hellín... si l'on continue tout droit, on va à Murcie. Peu après
les panneaux d'entrée dans la région, il faut tourner à droite
pour aller à Calasparra. Si le paysage est montagneux, l'air et la
végétation font tout de suite deviner la proximité de la
Méditerranée.
Juste à l'entrée de Calasparra, on
peut aller faire un tour au sanctuaire de la Virgen de la Esperanza.
Un sanctuaire troglodyte et fascinant. Du haut du sanctuaire, c'est
un panorama sur les rizières de Calasparra, qui font la notoriété
de la ville.

Les novilladas à Calasparra ne sont
qu'à 18h30, et laissent le temps d'errer dans les environs. Jusqu'à
Caravaca de la Cruz par exemple, où se trouve une arène, qui n'a
pas donné de toros depuis 2015, mais possède une splendide et
unique façade rouge, de style "Néomudéjar". Caravaca de
la Cruz est située tout près de Cehegín, le fief du vaillant Pepín
Liria.
Retour à Calasparra, où hormis celui
de la Virgen de la Esperanza, l'autre sanctuaire est la plaza de
toros dite "La Caverina". Très coquette, avec du charme,
datant de la fin du XIXème siècle, grande pour une arène de
novilladas, aux gradins très verticaux, et avec assez peu
d'escaliers y menant.
Côté soleil, pour celui qui n'était
pas au courant, figure l'inscription "Riz de Calasparra, le
meilleur du monde, avec dénomination d'origine".
La feria du riz de Calasparra, qui a
toujours lieu du 3 au 8 septembre, est la plus longue d'Espagne en
matière de novilladas avec picadors, car il y en a six d'affilée.
On pourrait aussi évoquer Algemesí (région de Valencia), mais
cette dernière propose des courses avec quatre novillos seulement.
En entrant dans les arènes, les peñas
locales distribuent des fascicules intéressants sur la course du
jour, dont les novillos ont toujours préalablement couru l'encierro
dans les rues le matin.
Le public de Calasparra est à la fois
chaleureux, attentif et exigeant. Venu en nombre (bien plus de trois
quarts d'arène), le jeudi 6 septembre, il invita les trois
novilleros à saluer à l'issue du paseo. Curro Márquez, Maxime
Solera et Cristóbal Reyes allaient donc affronter six exemplaires de
Prieto de la Cal, avec tous des pelages clairs, devant une forte
affluence.
La veille au soir, alors que se
terminait à peine la novillada de Dolores Aguirre qu'il toréait à
Villaseca de la Sagra, Maxime Solera passait à l'infirmerie afin de
faire une évaluation de son genou qui lui cause bien des problèmes
depuis le début de saison. A ce moment-là, son entourage faisait
grise mine et semblait avoir fait une croix sur les trois novilladas
qui restaient à toréer en 2018. Saison terminée, le bulletin du
médecin est prêt, et il sera envoyé dès que possible aux
organisateurs de Calasparra.
Bien plus tard dans la soirée,
finalement, Maxime Solera décida de se rendre à Calasparra,
d'honorer ses derniers contrats, et d'aller au bout de l'effort.
Coup de pouce du destin, puisque moins
de 24 heures plus tard, il s'offrira une sortie en triomphe des
arènes de Calasparra.
La novillada de Prieto de la Cal était
bien présentée, et elle fut variée en comportements, avec toujours
de l'intérêt. Lidiador, courageux, allant deux fois s'agenouiller
face au toril, Maxime Solera a pris l'avantage dès le combat de son
premier novillo, face auquel il réalisa une faena vibrante, avec de
très bons passages de la main droite comme de la gauche. Face au
second, plus arrêté et moins évident, il fut encore très sérieux
dans le combat et décrocha un autre trophée après une grande
estocade. Son picador Gabin Rehabi avait auparavant été fortement
ovationné du fait d'un excellent tiers de piques.

On était là devant le véritable
esprit de la novillada, avec des défis, car voyant Solera triompher,
Cristóbal Reyes alla lui aussi a portagayola face au dernier Prieto
de la Cal, tentant le tout pour le tout. Beaucoup de détermination,
mais malheureusement sans résultat à la clé.
Le novillero qui avait ouvert
l'après-midi, Curro Márquez, accusa pour sa part énormément de
manque de métier et de pratique, et connut une vraie galère.

Quand s'achèvent les novilladas aux
arènes de Calasparra, il fait toujours nuit car les neuf heures du
soir ont déjà retenti. Cette sortie tardive est entre autres due à
la "merienda" après le combat du troisième novillo, où
la course s'interrompt, pendant vingt minutes, et où le public ouvre
le contenu de sa glacière ou bien se rend au bar situé en haut des
gradins.

Des six novilladas de la feria de
Calasparra 2018, et sur dix-huit novilleros, deux sont sortis en
triomphe. Adrien Salenc face aux Valdellán, et Maxime Solera face
aux Prieto de la Cal. Deux français. Certes, il n'y a pas de
drapeaux sur les habits des toreros, ni même en piste face au toro,
mais cela donne espoir. Comme un joli symbole.
Florent